Il y a des moments où il faut être en capacité de se centrer sur soi pour mieux avancer. Il y a des revendications et des mouvements qu’il faut tenir à distance pour garder ses esprits et ne pas s’engouffrer dans des luttes féroces et vaines. Suivre le mouvement, rien que le mouvement et tout le mouvement n’est pas la solution. Notre attitude devrait aller au-delà de la colère et des ressentiments.
Il se passe certes des choses qui nous interpellent, tant de choses que nous avons besoin de poser, de peser, de soupeser et d'appréhender en évitant de nous perdre dans du dilettantisme. Il se passe des meurtres atroces, celui de George Flyod, sous nos yeux, en est un exemple surréel. Il y en a beaucoup d’autres. Le racisme, cette peur de l’autre exacerbée en supériorité à l’autre, que l’on voudrait réduire à séant ou à néant, est parmi nous, en gangrène fertile transmise depuis des lustres, il réduit les bien-pensant en bêtes féroces qui n’ont rien à envier à la faune la plus redoutable. Mais bien évidemment, les bêtes sauvages, ce sont les autres.
Il y a des luttes qui nous happent tant nous sommes viscéralement liés aux questionnements existentiels auxquels elles nous obligent à répondre. Comment en sommes-nous arrivés à cette méconnaissance de l’autre qui pousse à vouloir le soumettre à sa volonté ? Peut-on réduire un peuple à la couleur de sa peau et en faire une caricature du mal, du vilain, du fainéant, de l’absurde et que sais-je d’autre ?
Il y a des questions qu’il faut également se poser collectivement sur la part de responsabilité de ceux qui subissent ces atrocités depuis des siècles. Ce sont des questionnements difficiles mais nécessaires pour aller de l’avant. Tout ne peut être de la faute à l’autre. Les complicités, les chefs véreux et tout acabit ont existé et existent encore de nos jours.
Il y a surtout un énorme travail collectif à faire sur l’estime de soi, je sais, de nombreux panafricanistes se pâment d’orgueil et rejettent ce qui leur semble être une provocation, surtout venant de membres de la communauté, mais aucune question importante ne doit être éludée. Comment en est-on arrivés à accepter d’être violemment happés et si longtemps dans un monde de peur, de soumission et de négation ?
Pourquoi a-t-on permis à d’autres de vivre par procuration sur notre dos sans sourciller et sans gêne, en s’appropriant nos terres, nos richesses, nos réussites par le biais de traités farfelus. Tous les raccourcis ont été bons à emprunter, puisque l’autre, que nous sommes, n’est qu’un faire-valoir qui a accepté de se défaire de l’essentiel, pourquoi alors s’encombrer de sentiment de culpabilité ?
Il y a des moments où en toute lucidité, en toute conscience il faut dire ‘NON’. En toute conscience, le discernement devrait guider tous les mouvements de revendication justes dans l’essence mais qui finissent par être perçus comme superficiels et réducteurs. Je n’ai pas totalement adhéré au slogan ‘Black lives matters’, il recouvre justement à mon sens, cette notion de manque de confiance, de manque d’estime de soi. C’est une question qui ne devrait pas être posée, il est évident que toute vie compte. Ne pas respecter l’autre et le pousser à la mésestime de soi est le fondement du racisme. La seule réponse qui vaille, individuellement et collectivement, c’est de continuer le cheminement, fiers et altiers, et de redessiner les contours d'une malencontreuse relation qui empêche de vivre dans la quiétude et qui essaie de tirer inexorablement vers le bas.
Il ne s’agit pas de se révolter, de tout casser ou de se battre de se battre contre tous les blancs. Il s’agit plutôt de mettre en perspective l’absurdité du racisme et de pousser les racistes à se remettre en question et à s’élever spirituellement en cette période de transformation globale, propice à l’éveil des consciences, alors posons tranquillement la question ; ‘Racist what’s wrong with you ?’. Le respect de soi et de l'autre et 'la naïveté primaire' de l’amour inconditionnel, de part et d’autre, sont les clés.
Fatoumata KANE
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