Les mouvements Me Too, Defa Doy et bien d’autres, bien qu’accueillis avec soulagement par les femmes de tous les continents, demeurent malgré tout et très étrangement circonscrits par des pesanteurs socioculturelles qui maintiennent les femmes dans une auto censure qui constitue un frein véritable à l’atteinte des objectifs de libération de la parole pour dénoncer les violences, car il ne permet pas de dépasser un certain seuil qui rappelle le fameux plafond de verre que l’on ne se s’autorise pas à briser.
Il ne devrait pas s’agir simplement de suivre un mouvement mondial de libération de la parole pour dénoncer les violences faites aux femmes. Il s’agit de s’en approprier pour dénoncer les violences spécifiques constatées sur le terrain et d’apporter des réponses à travers la sensibilisation, la prévention et la protection par l’adoption et l’application de mesures punitives à la hauteur des méfaits commis.
Les incohérences des politiques, de la société civile et de certaines ONG et associations nous font entrevoir un jeu de dupes qui consiste à dénoncer et à exiger des textes de loi mais parallèlement à ne rien faire concrètement pour explorer sur le terrain les solutions qui conviennent dans un contexte particulier afin de mettre en place des procédures fiables et protectrices pour que les victimes puissent sans hésitation aller vers des structures d’écoute et d’accompagnement adaptées au contexte local. Aucun effort évident ne semble être fait dans ce sens.
L’évaluation de la souffrance, du risque encouru et du niveau de besoin d’aide des victimes est primordiale dans tout accompagnement psychosocial, mais ne semble pas clairement définie par des procédures adaptées au contexte. L’aide psychologique d’urgence et la communication de soutien ne font pas encore, l’objet de conduites institutionnelles bien établies dans le cadre d’interventions efficaces en réseau. C’est pourtant ce type de mécanismes qui pourraient instaurer un meilleur climat de confiance et permettre la libération de la parole.
Quelles sont nos connaissances sur les VBG ? Comment repérer les phases de l’urgence et mettre en place un service de soutien téléphonique et d’écoute institutionnelle? Quels sont les services de base et de sécurité non spécialisés et spécialisés disponibles?
Quels sont les atouts et les limites de la médiation familiale et communautaire? Quel accompagnement social spécialisé ? Bref, comment allier la capacité à intervenir au meilleur intérêt ?
Toutes ces questions devraient être l’objet de discussions sérieuses et de communications pertinentes à l’initiative des gouvernants, de la société civile et des associations afin que rien ne soit laissé au hasard.
Les histoires scabreuses quotidiennes de viols, de violences physiques, morales, économiques, de féminicides sont insoutenables. Il est temps de sortir des protestations inopérantes et de refuser de fermer les yeux sur les ignominies qui traumatisent et tuent chaque jour nos filles, soeurs et mères sous nos yeux. Il est plus que temps de refuser d’être des complices silencieux d’horribles méfaits que nous essayons de camoufler dans nos maisons, quartiers, bureaux, au sein de nos communautés.
Refusons énergiquement d’être complices parce qu’adeptes du silence, soyons à l’écoute et apprenons à croire, à protéger et à ne pas juger les victimes.
Chacun de nous a une responsabilité dans la perpétuation ou non des croyances et suppositions insensées qui sont à l'origine des violences basées sur le genre.
Fatoumata KANE - Janvier 2020
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